Interview : Squid Game et le cinéma Coréen… par Lee Sang-Hee

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L’acteur a reçu énormément d’attention après son rôle de verrier dans Squid Game. Mais celui-ci travaille dans l’industrie depuis plus de 30 ans et a beaucoup de beaux projets à son actif. Lee Sang-Hee est doté d’une grande expérience dans l’industrie –  celle-ci regorgeant d’histoires à raconter- et est également quelqu’un pour qui j’ai beaucoup d’affection. C’est donc à travers ses mots que je voulais partager avec mes lecteurs son expérience de la série au succès mondiale, mais surtout son point de vue sur l’immense succès que connaît maintenant l’industrie cinématographique coréenne dans le monde.

Lee Sang-Hee dans Squid Game, Netflix

Une belle alchimie et une aura unique

C’est un lien particulier qui s’est tissé entre l’acteur Lee Sang-Hee, son épouse et moi-même depuis notre première rencontre sur un tournage, un heureux hasard du destin. Artiste dans l’âme, l’acteur aime profondément son travail et arbore une joie de vivre contagieuse. Constamment prêt à faire des plaisanteries, il est toujours agréable de se retrouver en sa compagnie.

Lee Sang-Hee et moi-même dans un café de Séoul, Photo par Marion Pichardie

Mes débuts de chanteuse en Corée…aux côtés de Lee Sang-Hee

Alors que l’acteur et son épouse -agent également- me conduisaient de retour chez moi, nous nous sommes mis à chanter à tue-tête dans l’habitacle sur nos chansons Coréennes et Françaises préférées. Après ce petit concert improvisé, il m’a alors parlé de sa propre comédie musicale -intitulée “Etes-vous heureux Mr Jang Yoo?”- et de son envie de m’y faire participer.

Affiche de la Comédie Musicale “Etes-vous heureux Mr Jang Soo?”

Début octobre 2022, j’eus donc le privilège de monter sur scène aux côtés de toute l’équipe, incluant également mon frère, chanteur professionnel de passage en Corée. Des moments que je n’oublierai pas et pour lesquels je serai toujours sincèrement reconnaissante, tout comme toutes les fois où le couple m’a pris sous son aile.

Toute l’équipe de la Comédie Musicale “Etes-vous heureux Mr Jang Soo?” Photo par Marion Pichardie

Interview : Squid Game et le cinéma coréen… par Lee Sang-Hee

Marion Pichardie : Pourriez-vous nous parler un peu de votre parcours ?

Lee Sang-Hee: J’ai commencé en 1986 à jouer dans des pièces de théâtre, à l’âge de 26 ans. Puis à partir de 2007, j’ai fait mes débuts dans les films. Maintenant, je fais de tout. Sinon, je suis marié depuis 32 ans et habite Incheon depuis 22 ans ! (Rires)

MP : Quand avez-vous entendu parler du projet de Squid Game et qu’en avez-vous pensé ?

LSH : Mon premier film était aussi le premier film du réalisateur de Squid Game, Hwang Dong-Hyeok. Le titre était « My Father » et celui-ci n’a pas eu beaucoup de succès. Seulement 850 000 spectateurs. 

Affiche de My Father (2007), Lotte Entertainment

Après la sortie du film, j’ai reçu un appel de la part de l’assistant réalisateur Park Jeong-Bae. Je lui ai demandé s’il pouvait venir à Incheon avec le réalisateur Hwang. Je voulais leur offrir un repas. Quand je les ai revus, ils me donnaient l’impression d’être un peu découragés. Avant, ils étaient confiants et fiers. Je leur ai demandé s’ils avaient peut-être de bonnes nouvelles. Ils m’ont répondu qu’ils écrivaient un scénario. C’était celui de Squid Game. Je n’ai pas dit grand-chose sur le moment et nous nous sommes quittés. 

Malgré tout, je pensais toujours à eux. Un autre jour, j’ai appelé le réalisateur Hwang pour lui demander s’il allait bien. Il était à Cheonan, également pour écrire un scénario. Il m’a dit qu’il resterait là-bas pendant un mois. 

J’y suis allé avec mon frère pour le voir. On a dîné ensemble. Il vivait dans une chambre où les travailleurs de station essence restaient. Je me rappelle m’être dit : “si j’avais de l’argent… j’aurais pu l’aider…” On s’est dit au revoir et je suis retourné chez moi. Avec le temps j’ai oublié cette affaire.

Le réalisateur Hwang a entre-temps tourné d’autres films comme Silenced, The Fortress…ect 

Affiche de The Fortress (2017), CJ Entertainment

12 ans plus tard, alors que le projet avait été rejeté plusieurs fois, le producteur m’a appelé et m’a dit « Te souviens-tu de Squid Game ? Cette série va se faire. » Je me suis demandé si je rêvais. 

Puis, dans un studio de Hongdae j’ai rencontré le réalisateur Hwang de nouveau. On m’avait dit que beaucoup de personnages allaient mourir. J’avais fait la demande à l’assistant de pousser pour que le mien disparaisse le plus tard possible ! (Rires) Il l’a fait passer à Hwang Dong-Hyeok. Deux mois après, je recevais le scénario.

Affiche de Squid Game (2021), Netflix

MP : Comment était-ce d’être dirigé par le réalisateur Hwang Dong-Hyeok et de jouer aux côtés de Lee Jung-Jae ainsi que des autres acteurs ?

LSH : Le réalisateur Hwang donne des directives de manière simple et clair. C’est bien car cela nous permet en tant qu’acteurs de réfléchir nous-mêmes à notre jeu.

Sur le plateau de Squid Game, il y avait une ambiance spécifique. Les acteurs semblaient stressés, même désespérés, en accord avec le sujet de la série. Nous n’avons pas eu beaucoup d’interactions entre nous, on se regardait juste pour se dire bonjour. Nous restions dans nos personnages et dans l’histoire.

Lee Sang-Hee, maquillage/coiffure sur le tournage de Squid Game. Photo par Lee Sang-Hee, Libre de droits

MP : Qu’avez-vous à dire sur le succès grandissant des séries coréennes dans le monde ? Une analyse particulière ?

LSH : Dans le cinéma Coréen, les réalisateurs écrivent le scénario eux-mêmes. Ils le relisent et le modifient 15, 16, 17 fois. Ce doit être parfait. Il faut au moins cinq ans pour rédiger un scénario. Récemment, quand l’acteur Lee Jung-Jae et le réalisateur Hwang ont reçu un prix, ce dernier a dit que « les réalisateurs coréens sont exigeants. » 

Chaque œuvre cinématographique est bien orchestrée en Corée. Également, les spectateurs de notre pays s’intéressent. S’ils n’aiment pas un film, ils le disent à leur entourage. Mais si au contraire ils aiment, ils font de même.
Je crois que cette culture de bouche-à-oreille et de réalisateurs exigeants ont beaucoup contribués au succès du cinéma Coréen.

Affiche de Parasite (2019), CJ Entertainment

 

MP : En tant qu’acteur Coréen, qu’est-ce que cela vous fait de voir votre pays grimper en flèche dans le monde entier et d’être témoin (et acteur !) de phénomènes mondiaux comme Squid Game ou Parasite ?

LSH : Je suis très heureux de ce succès mais suis en même temps un peu inquiet. Combien de temps cela va-t-il durer ? C’est pour ça qu’il faut être humble et ne pas trop se vanter de cette réussite. Les grands et renommés réalisateurs et acteurs, ce ne sont pas nous les Coréens. La plupart d’entre eux sont d’origine occidentale, comme la France. On doit être vigilant et continuer nos efforts. 

Les Kdramas sont une joie pour les Coréens, car nous avons toujours des inquiétudes sociales, politiques etc. Des gens sont aussi jaloux parfois de notre succès comme le Japon. Ce dernier débattant par exemple sur le fait qu’il serait le précurseur de série comme Squid Game.
Pour faire face, nous devons persévérer, faire des efforts et alimenter ce succès. Dans le passé, le maître Kim Gu avait dit ceci : « Je souhaite que la Corée du Sud puisse un jour être une puissance culturelle. » Je pense qu’aujourd’hui, ça se réalise petit à petit et j’en suis heureux.

Affiche du Kdrama Crash Landing on You, énorme succès de 2019, tvN

MP : Imaginiez-vous un tel essor lorsque vous avez commencé votre carrière ?

LSH : Je n’aurais jamais imaginé. À l’époque en Corée, les conditions de production de films n’étaient pas très bonnes.

À l’école, j’avais des amis qui sont partis étudier le cinéma aux États-Unis. Tout a commencé dans les pays occidentaux. Par contre, en ce qui me concerne, je n’ai jamais fait d’études spécialisées dans les films ou le théâtre.

La société de production de Squid Game avait d’autres films en préparation, mais après l’immense succès de la série, elle a tout mis en suspend pour se concentrer sur une suite.

Affiche de Squid Game, saison 2, Netflix

À Hollywood, des produits dérivés de Squid Game sont vendus aussi, pas toujours légalement. Puis, les acteurs de la série ont été reconnus là-bas, alors qu’ils buvaient un verre dans un bar. Oui, je n’aurais jamais imaginé le succès de ce drama. Celui-ci parle de jeux coréens traditionnels « du petit peuple. » Qui aurait imaginé que le monde entier aimerait ça ?

Un grand merci à la traductrice Park Ha-Eun durant l’interview! 

Lee Sang-Hee, la traductrice Park Ha-Eun et moi-même lors de cette interview. Photo par Marion Pichardie

Marion Pichardie

Fondatrice de Bokjoo Nabi

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